Points clés
- Le CNESER juge en appel les décisions rendues par les sections disciplinaires des établissements d’enseignement supérieur à l’égard des enseignant·es-chercheur·euses
- Depuis 2020, il n’est plus compétent pour la procédure d’appel des sanctions prononcées à l’égard des usager·ères (étudiant·es). L’appel s’exerce désormais directement devant le Tribunal administratif
Sa composition
Le code de l’éducation prévoit que le CNESER statuant en matière disciplinaire est présidé par un·e conseiller·ère d’État (Art. L232‑3). En plus du ou de la président·e, il doit être composé de 10 conseiller·es titulaires et de 10 conseiller·es suppléant·es, la moitié parmi les professeur·es d’universités ou assimilés et l’autre moitié parmi les maîtres·ses de conférence ou assimilé·es (Art. R232-23).
La procédure, en bref
La procédure devant le CNESER (tout comme devant la section disciplinaire si elle a statué en 1er ressort) oppose la présidence de l’établissement d’enseignement supérieur (ou le·la recteur·ice, mais c’est plus rare) à l’enseignant·e mis en cause.
La victime n’est pas une partie dans la procédure. Son rôle se limite à venir témoigner devant la commission d’instruction et/ou à l’audience du CNESER ; et seulement si elle est invitée à le faire.
Pour chaque affaire, le·la président·e du CNESER désigne deux membres qui vont composer la commission d’instruction, dont un·e rapporteur·euse. Ce ou cette dernière ne pourra pas prendre part au délibéré final (Art. R232-26 du Code de l’éducation).
L’instruction est en principe de trois mois, mais peut durer plus longtemps. La commission d’instruction peut auditionner toute personne qu’elle estime utile pour « l’éclairer ». Les parties sont invitées à produire des mémoires pour s’expliquer sur les faits et à produire les pièces qui servent de fondement à leurs demandes (il faut entendre par « pièces », les preuves de la faute disciplinaire d’un côté ou de son absence de l’autre).
Ces auditions, mémoires et nouvelles pièces vont permettre au·à la rapporteur·euse d’établir un rapport contenant « les diligences accomplies et le procès-verbal de chacune des auditions. Il comprend un exposé des faits ainsi que l’opinion personnelle du rapporteur sur les solutions qu’appelle le jugement de l’affaire » (Art. R. 232–37 du code de l’éducation).
Ce rapport doit être transmis aux parties au moins 15 jours avant l’audience de jugement.
La formation de jugement est ensuite réunie pour statuer. Les membres qui siègent à l’audience doivent être « d’un rang égal ou supérieur » à la personne poursuivie. Cela signifie que seul·es les professeur·es jugent leurs pair.es et qu’il·elles peuvent juger des fautes reprochées aux maîtres·ses de conférence alors que ces dernier·es ne peuvent juger les professeur·es d’université.
Le·la président·e de la formation de jugement peut faire entendre des témoins à l’audience. La personne poursuivie ainsi que « l’auteur des poursuites disciplinaires » (présidence de l’établissement ou recteur·ice), peuvent présenter des observations orales et faire également citer des témoins à l’audience.
La décision prise par le CNESER doit être motivée.
L’assistance de la victime citée comme témoin
Le code dispose : « Toute personne citée comme témoin et qui s’estime victime, de la part de la personne poursuivie, des agissements [constitutifs de discrimination ou de harcèlement moral ou sexuel], peut demander à être assistée de la tierce personne de son choix » (Art. R232-38 du code de l’éducation).
Désormais, cette capacité existe également devant la section disciplinaire de l’établissement d’enseignement supérieur.
Recours contre la décision rendue
Seule la personne poursuivie, la présidence de l’établissement d’enseignement supérieur et le·la ministre chargé·e de l’enseignement supérieur peuvent former un recours contre un jugement du CNESER. Ce recours est porté devant le Conseil d’État, la plus haute juridiction administrative.
La personne victime n’a pas droit d’exercer de recours contre la décision du CNESER.
Sources
- Code de l’éducation : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006071191/LEGISCTA000006193148/#LEGISCTA000006193148
Pour aller plus loin
- https://www.campusmatin.com/definition/cneser.html
- https://www.data.gouv.fr/fr/reuses/cneser-disciplinaire-plus-dun-tiers-des-enseignants-mis-en-cause-dans-des-affaires-de-vss-sont-relaxes
- Pour une critique du CNESER par le Clasches : https://clasches.fr/communique-de-presse-du-19-octobre-2022-la-deontologie-ca-nexiste-pas-le-cneser-se-surpasse-et-relaxe/
Critiques et perspectives
Au regard du nombre d’affaires faisant état de faits de violences sexistes et sexuelles, notamment contre des enseignants, les membres du CNESER devraient obligatoirement recevoir une formation d’au moins deux jours relative à la lutte contre ces violences, spécifiquement dans l’enseignement supérieur.
La·les personnes victimes devraient être systématiquement informées de la tenue de l’audience et appelées à témoigner si elles le souhaitent.
Elles devraient par ailleurs avoir le droit de former un recours contre les décisions rendues tant par les sections disciplinaires que par le CNESER.
——
Exemple d’une décision rendue par le CNESER contre un maître de conférence ayant commis des violences à caractère sexuel contre une étudiante : voir JURISPRUDENCE
CNESER, 23 novembre 2022, N°1574 [BO du 16 février 2023]