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Audition administrative ou audition d’instruction d’enquête

Règles générales d’une audition

L’audition en présen­tiel est à priv­ilégi­er. Le lieu d’audition doit être facile­ment acces­si­ble sans être iden­ti­fi­able par les per­son­nes non concerné·es par l’enquête, il doit garan­tir la plus stricte con­fi­den­tial­ité des échanges.

La per­son­ne audi­tion­née doit être aver­tie du cadre dans lequel s’inscrit l’audition et de son déroulé, en reprenant le texte remis à la per­son­ne audi­tion­née lors de sa con­vo­ca­tion ou invi­ta­tion.

Il doit lui être rap­pelé les règles déon­tologiques applic­a­bles et ses droits. Notam­ment le droit de se taire, ou le droit au silence, con­for­mé­ment aux dis­po­si­tions de l’article 9 de la Déc­la­ra­tion des droits de l’Homme (Con­seil con­sti­tu­tion­nel 4 oct. 2024, n° 2024–1105 QPC).

Les audi­tions sont menées de manière iden­tique auprès de toutes les per­son­nes audi­tion­nées avec impar­tial­ité et cour­toisie, sans volon­té de désta­bil­i­sa­tion, avec des ques­tions ouvertes, pré­parées à l’avance mais adapt­a­bles, dans le cadre d’un entre­tien semi-direc­tif : “laiss­er la per­son­ne témoign­er spon­tané­ment et de ne pas ori­en­ter a pri­ori son témoignage en lui posant d’emblée des ques­tions pré­cis­es. » (IGESR p. 13).

Il n’est pas souhaitable d’enregistrer les audi­tions pour ne pas biais­er les échanges. Il con­vient de s’assurer que la per­son­ne audi­tion­née n’enregistre pas de son côté.

L’audition dans le cadre d’une enquête administrative

S’inscrivant dans une phase pré-dis­ci­plinaire, l’audition des per­son­nes sig­nalantes et témoins n’est pas, en théorie, oblig­a­toire dans le cadre de l’enquête admin­is­tra­tive con­tra­dic­toire, sauf pour les fonc­tion­naires et agent·es publiques qui reçoivent une con­vo­ca­tion. En con­séquence, on ne peut con­train­dre un·e étudiant·e qui refuserait de se présen­ter à l’invitation.

Il con­vient toute­fois de con­vo­quer à une audi­tion toutes les per­son­nes sus­cep­ti­bles d’apporter des élé­ments sur la matéri­al­ité des faits même si celles-ci ont déjà délivré un réc­it (oral et écrit) auprès du dis­posi­tif de sig­nale­ment.

Les objec­tifs de l’audition dans le cadre d’une enquête admin­is­tra­tive sont :

  • Éclair­cir et/ou com­pléter les comptes-ren­dus déjà pro­duits, mais il est inutile de faire répéter aux auteur·es des sig­nale­ments leurs réc­its de VSS
  • S’il s’agit d’une per­son­ne vic­time ou témoin qui n’a jamais été enten­due, recueil­lir son réc­it le plus pré­cis pos­si­ble des agisse­ments (voir sur ce point la notice Écoute), et des con­séquences passées et actuelles
  • Recueil­lir éventuelle­ment de (nou­veaux) élé­ments de preuve
  • Établir un procès-ver­bal d’audition signé, tout par­ti­c­ulière­ment en cas de suites dis­ci­plinaires

L’IGESR pré­cise dans son rap­port de 2023 :

« Le recueil de témoignages en cas de sit­u­a­tion de VSS et de har­cèle­ment moral doit être le plus pré­cis et détail­lé pos­si­ble sur les faits, les pro­pos tenus, le con­texte, la chronolo­gie des faits et les dates, ain­si que sur les effets sur la san­té et/ou les con­di­tions de tra­vail ou de sco­lar­ité etc. (…) en l’absence de preuve matérielle et/ou de témoin direct, la méthodolo­gie adop­tée pour établir la matéri­al­ité des faits est celle du fais­ceau d’indices con­cor­dants. »(p.10)

Con­cer­nant l’anony­mat des témoignages, l’IGESR (ibid.) :

« (…)dans toute la mesure du pos­si­ble faire acte de péd­a­gogie et ras­sur­er les per­son­nes enten­dues en leur pré­cisant au démar­rage de l’audition que :

– la mis­sion leur assure la con­fi­den­tial­ité des échanges et que le rap­port sera rédigé sans citer leur nom

– les PV ne seront com­mu­niqués aux per­son­nes mis­es en cause qu’en cas de suites admin­is­tra­tives, dis­ci­plinaires ou pénales ; »

Une per­son­ne enten­due comme témoin peut désor­mais se faire assis­ter par une per­son­ne de son choix mais il ne s’agit que d’une fac­ulté et non d’un droit.Toutefois, il est préférable, surtout si la per­son­ne qui assiste le témoin est un·e avocat·e d’accéder à la demande pour éviter de frag­ilis­er l’audition et en con­séquence l’équilibre de l’enquête.

C’est ce que con­firme, l’IGESR dans le texte susvisé : « Si le témoin le demande, la présence d’un tiers (avo­cat ou autre per­son­ne, par exem­ple un représen­tant syn­di­cal ou un·e col­lègue) ne doit pas être refusée a pri­ori, même s’il ne s’agit pas d’un droit. Il faut par con­tre rap­pel­er au témoin que c’est lui que la mis­sion souhaite enten­dre. La parole du tiers « accom­pa­g­nant » ne doit en aucun cas se sub­stituer à celle du témoin. Dans l’hypothèse où le tiers souhaite man­i­feste­ment lui-même être enten­du par la mis­sion, en par­ti­c­uli­er lorsqu’il s’agit d’un délégué syn­di­cal, il con­vient de lui pro­pos­er un ren­dez-vous dis­tinct pour recueil­lir son témoignage » (IGESR, p.14).

L’audition dans le cadre d’une commission d’instruction

Une fois la procé­dure dis­ci­plinaire déclenchée par l’autorité admin­is­tra­tive, une phase de com­mis­sion d’instruction chargée de recueil­lir l’ensemble des élé­ments de nature à ren­dre l’affaire en état d’être jugée par la sec­tion dis­ci­plinaire, s’ouvre. Il revient notam­ment aux rap­por­teurs d’établir l’exposé des faits, les obser­va­tions présen­tées par l’autorité qui a engagé les pour­suites ; les obser­va­tions de la per­son­ne déférée.

Cette phase est prévue aux arti­cles R. 712–31 à R. 712–33 du Code de l’éducation pour les enseignant·es chercheur·es et aux arti­cles R. 811–29 pour les usager·es.

L’audition des intéressé·es n’est pas oblig­a­toire dans ce cadre si les mem­bres de la com­mis­sion esti­ment dis­pos­er d’éléments suff­isam­ment détail­lés, étayés et cohérents. En effet, dans ce cas, les rap­por­teurs peu­vent se fonder sur des obser­va­tions pro­duites par l’intéressé·e.

Il importe toute­fois de pré­cis­er que si la per­son­ne mise en cause ou tout autre témoin souhaite être enten­du, l’audition d’instruction ne peut leur être refusée.

S’agissant d’une phase dis­ci­plinaire, les garanties procé­du­rales de l’audition sont plus stricte­ment encadrées que lors de la phase de l’enquête admin­is­tra­tive.

Ain­si, con­for­mé­ment à l’article R. 712–33 du Code de l’éducation, la con­vo­ca­tion de la per­son­ne mise en cause doit faire fig­ur­er son droit d’être assisté d’un con­seil de son choix (avo­cat, syn­di­cat, etc.) et de son droit de pren­dre con­nais­sance de l’ensemble des élé­ments ver­sés au dossier de sai­sine de la sec­tion dis­ci­plinaire.

Par ailleurs, les audi­tions sont soumis­es au principe du con­tra­dic­toire, ce qui implique l’accès à tous les élé­ments du dossier.

La com­mis­sion d’instruction peut enten­dre toutes les per­son­nes dont le témoignage serait de nature à éclair­er l’affaire. Seules les per­son­nes citées s’estimant vic­times peu­vent venir assistées d’un con­seil de leur choix.

Pour aller plus loin

Code de l’éducation, arti­cles R. 712–31 à R. 712–33

DGESIP, Sec­tions dis­ci­plinaires des étab­lisse­ments publics d’enseignement supérieur placés sous la tutelle du min­istère chargé de l’enseignement supérieur com­pé­tentes à l’égard des enseignants, mars 2021 : https://services.dgesip.fr/fichiers/Guide_composition_SD_ENSEIGNANTS_mars21.pdf

DGESIP, Procé­dure devant les sec­tions dis­ci­plinaires com­pé­tentes à l’égard des usagers, mars 2021 : https://services.dgesip.fr/fichiers/Guide_PROCEDURE_SD_USAGERS_mars21.pdf

IGESR, Les enquêtes admin­is­tra­tives sus­cep­ti­bles, de suites dis­ci­plinaires, Vade-mecum à l’usage des inspecteurs généraux (cinquième édi­tion) juil­let 2023
https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/sites/default/files/2023–07/igesr-22–23-229a-28688.pdf

Jurisup, Guide pra­tique relatif aux procé­dures dis­ci­plinaires applic­a­bles aux enseignants-chercheurs et aux per­son­nels exerçant des fonc­tions d’enseignement à l’université, juil­let 2021.

Voir aussi